les aventures étendues de Cecilia et Marquito au pays des steppes

26 marzo 2006

Pour l'interro !

ñandu

On suppose que les premiers hommes à se balader en Amérique venaient d' Asie par le détroit de Bering, il y a une trentaine de milliers d'années. D' Alaska ils sont descendus tout doucement, semant au passage les germes de grandes civilisations (hop là quelques graines d'aztèques et de mayas au Méxique ; deux ou trois pépins d' inca au Pérou...). Toujours plus au sud. Du coup la Patagonie est le dernier endroit de la planète à avoir été peuplé. Les premières traces de présence ici ont 11 000 ans. Ces steppes d'après le degel étaient déjà parcourues par le giboyant guanaco, le concurrentiel puma, le volatile ñandu ... et elles le sont toujours.

Sur cette échelle de temps, Magellan a pris la mer avant-hier, en 1519. Il est mandaté par la couronne espagnole mais parmi les 250 hommes qui le suivent on trouve aussi des portuguais (dont Magallanes lui même), des français et des italiens. L'année suivante, longeant la côte atlantique depuis le Brésil, il découvre le détroit. Prise par le gros temps, une des 5 caravelles se refugie en Terre de Feu. L'endroit est peuplé. Cette première rencontre avec les autochtones impressionne fortement les marins :

"... un homme de stature gigantesque, nu sur la rive, chantait et dansait en jetant de la poudre sur sa tête ... le capitaine envoya un des nôtres pour qu'il imite ses actions en signe de paix ... nous ne lui arrivions pas à la ceinture ... "

Ces natifs "aimables et sympathiques" sont surnommés "Patagons", du nom d'un géant de roman.

Les peuplades de chasseurs nomades ou de pécheurs (assez résistants pour rester immergés dans les eaux glacées du détroit à la recherche de coquillage !) ont aujourd'hui disparues. Elles ont été décimées par des maladies bénines venues d'Europe, enfermées par décrets sur des terrains clôturés ou massacrées. La région est aujourd'hui peuplée par les petits-enfants des pionniers européens (britaniques, allemands, autrichiens, hongrois ...).

Jusqu'à cette dernière génération les "indios" (métis) étaient meprisés. La grand-mère de notre amie Yanina est une descendante des indiens Tehuelche. Elle parle encore la langue, mais aux journalistes qui viennent la voir pour un enregistrement elle ne décroche pas un mot, ou leur raconte des blagues !


piche ou tatou de Patagonie

puma (appelé ici león)

guanaco

25 marzo 2006

Cueva de las manos





Le petit groupe arrive près du canyon Rio Pinturas en camionette. Il est composé d'une dizaine de touristes, argentins de Buenos Aires ou européens. Notre débonnaire guide, qu'on peut appeler Harry ou Juan, a des aïeux allemands, écossais et hollandais. La camionnette elle même est d'un modèle russe des annees 80 ayant subit une greffe de moteur américain. Melting-pot patagon !

On descend 200 m depuis le haut du canyon vers les cavités. Les peintures sont bien conservées.
Quelques soient nos ascendants, nous ne sommes plus qu'un petit groupe d'humains devant les traces d'anciens petits groupes d'humains, pensais-je, ému. Ceux là se baladaient en slip de peau de guanaco il y a dix mille ans, et pourtant on leur trouve des considérations familières.

Les peintures les plus anciennes (-9500 av JC) représentent des scènes de chasse. Les archéologues relient ces dessins a un culte chamanique pour lequel la représentation de ce qu'on souhaite aide à l'obtenir.
On imagine, grâce à notre diable de guide, le gars se peulant les meules dans sa grotte en plein hiver austral. Il repense à son dernier méchoui avec nostalgie et attrape son pinceau parce qu'il n'a rien d'autre à faire en attendant les beaux jours.
Il y a aussi quelques dessins appelés "les danseurs"... pardon, nous on voit plutôt des figures aux jambes écartées ... pour Harry-Juan, comme les interprétations les plus simples sont les meilleures, on rigole bien."Les archéologues sont tous plus ou moins crédibles en fonction de leur degré d'alcoolémie..."

Les négatifs de mains sont plus récents (- 7000). Les gars s'emplissaient la bouche de pigment (il y en a plein dans le coin), se servaient d'un os creux de ñandu comme d'une paille et soufflaient sur la main appuyée au mur. Les théories vont bon train quand à la signification de ce geste. Cure préconisée par le chaman guérisseur ? Remerciement à la déesse mère ?
Empreintes de main gauche, de main droite, des deux en même temps; empreintes d'hommes plus ou moins âgés, boudinés ou rabougris par l'arthrite; et puis de femmes, d'enfants; et puis tiens, empreinte de pied, et hop de patte de guanaco par-ci, de puma par là, de ñandu... empreintes superposées ou isolées, éparpillées, cachées.
L'absence de hiérachie ou d'une quelconque organisation invitent à écarter les théories associant de façon rigide une unique croyance ou superstition.
Ce qui vient d'abord, pour le dessinateur, c'est la découverte d'une super réserve de pigments ! Le gars fait son mélange, prend son os, souffle sur sa main et se dit :

"Excelleeeent !"

Bien sûr après coup on y trouve des motivations : laisser une trace pour ceux qui suivent, marquer son appartenance, remercier, se protéger, guérir, réaliser un souhait ...un peu de tout ça, sûrement.

14 marzo 2006

Far South

Marc Antoine nous laisse avec Captain et Pico Blanco à Rio Capitan, 150 km de l'estancia, avec le projet de s'aventurer dans la Cordillère visible au loin. Le lendemain, lucides, on fait la somme des facteurs de difficulté (météo incertaine, méconnaissance du pays, amateurisme total de Marc en matière d'équitation)...

"- C'est quoi ça ?
- Un mors, tu lui mets dans la bouche
- Euh...dites 33 ...?"

... on fait le choix raisonnable de rentrer direct et tranquillement (avec une moyenne de 20km/jour).

Belle chevauchée, grands espaces.


Le soir on arrive aux portes d'estancias isolées, accueillis par le peón ou les estancieros.
Un toit pour la nuit, un repas chaud, un pré pour les chevaux, des rencontres qu'on oubliera pas, des gens chaleureux.
On se sent un peu le troubadour reçu au coin du feu pour conter des histoires, donner des nouvelles de plus loin.

Le matin on prend toujours pas mal de temps pour seller les chevaux (notamment pour installer le recado, la selle locale), répartir les charges et vérifier les attaches.

Et puis le soir d'après, s'il n'y a pas d'estancia, nuit à la belle ! Au milieu de ruines, par exemple, près d'un bout de mur pour se couper d'un vent omniprésent (et qui change de direction pendant la nuit...).

Un soir on arrive dans une clairière étrange. On sent comme une présence, peut être de celui qui a laissé ces traces : foyers, bouteilles vides, matelas défoncé. Abrités par une haie de peupliers et sous des pommiers, on essaye de s'endormir malgré le remue-ménage des chevaux et leur mastication convaincue... l'herbe est verte !

On les surveille de près, leur cherchons des pâturages, de l'eau, et négocions chaque pas (il faut dire qu'ils ne sont pas ferrés et que le terrain est souvent rocailleux). Bons et heureux souvenirs de leur compagnie, des paysages, des odeurs, du vent qui déporte, du soleil, un peu de pluie, juste un peu histoire de dire, Marc qui se transforme petit a petit en cavalier, qui monte et descend du cheval comme d'un rien, le selle, trop facile, trotte,... un gros écart, mais non, même pas tombé, parfait équilibre, ça !